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  • Photo du rédacteurLa Cinéphile

Nope [CRITIQUE]

Dernière mise à jour : 22 janv. 2023

Pour son troisième film en tant que réalisateur, Jordan Peele poursuit son exploration du genre horrifique en prenant cette fois-ci pour point de départ les ovnis, une thématique science-fictionnelle propice à l’effroi qui a déjà été traitée à de nombreuses reprises. Alors, Nope parvient-il à renouveler le genre ou est-il simplement un énième sur les aliens ?









Les habitants d’une vallée perdue du fin fond de la Californie sont témoins d’une découverte terrifiante à caractère surnaturel.











Beaucoup de bruit pour rien ? C'est en tout cas ce que l'on peut se dire durant les premières scènes du film. Avec une mise en route est longue et laborieuse, où on a du mal à voir où Jordan Peele veut en venir avec son duo de personnages principaux, OJ (Daniel Kaluuya) et Emerald (Keke Palmer) pour lesquels le spectateur a alors peu d'empathie vu leur caractère.

Fort heureusement, cela ne dure pas. Les événements qui surviennent permettent aux personnages de laisser tomber leur masque pour se révéler tels qu'ils sont réellement, ce qui les rend plus appréciables.

Le fil conducteur de l'intrigue finit par se dessiner peu à peu et les différentes scènes qui semblaient n'avoir pas ou peu de liens entre elles prennent alors tout leur sens. L'histoire a tout d'un puzzle dont les pièces aux formes étranges finissent par former un ensemble surprenant avec différents niveaux de lecture et d'interprétation possibles.

Nope n'est pas le genre de film à regarder de manière passive, et c'est peut-être la raison pour laquelle certains spectateurs auront du mal à accrocher. Il demande un certain investissement pour être pleinement apprécie.

Bien sûr, il y a des scènes marquantes et dynamiques, qu'il s'agisse du passage dans les écuries où OJ fait face à quelque chose d'étrange, de la pluie de sang, de la scène de l'ascension ou encore du climax. Deux de ces scènes permettent d'ailleurs à Peele d'apporter une légère touche de gore au sein d'un film d'horreur qui tente de condenser des sous-genres majeurs comme le film de monstre, la science-fiction ou encore le survival.

Mais au-delà de ce spectaculaire, qui fait son petit effet, le film vaut surtout pour son atmosphère oppressante et l'effet d'attente créé par le rythme lent notamment au début. La révélation tant espérée est à la fois déroutante et astucieuse, bien que l'on se pose encore beaucoup de questions lorsque le générique arrive.

Néanmoins, Nope n'est pas un film seulement premier degré et l'intérêt de ce long-métrage ne repose pas tant sur le fait de connaître la véritable nature de ce qui menace les personnages et de savoir pourquoi cela arrive mais sur les réflexions proposées par Jordan Peele dans son œuvre.

Le réalisateur y dépeint une certaine partie de l'industrie cinématographique d'aujourd'hui, où un savoir-faire transmis de génération en génération est délaissé au profit de la technologie qui, si elle peut parfois être prodigieuse, ne parvient pas toujours à reproduire l'effet d'authenticité qui fait qu'on croit à ce qui nous est montré.

Par ailleurs, en regardant Nope, on ressent l'influence d'un certain style du cinéma de genre, avec notamment une ambiance similaire à celle présente dans les films de M. Night Shyamalan comme Signes (2001) ou Phénomènes (2008). Cette atmosphère, on la retrouve également dans le cinéma de Steven Spielberg avec La guerre des mondes en 2005. Peele explore ainsi à son tour la thématique de l'attraction du spectaculaire.

Il y a un désir, presque une pulsion, chez les spectateurs, qu'il s'agisse de nous ou des personnages du film à l'image du public du Star Lasso Experience, de voir un événement spectaculaire. La curiosité est plus forte que tout et ce même face à une chose qui nous dépasse car il y a un besoin de ressentir des émotions fortes, d'avoir peur. Cette curiosité fonctionne car la nature du spectaculaire fascine malgré sa dangerosité et il procure un sentiment particulier du fait qu'il effraye et émerveille en même temps.

De ce fait, tout comme chez Spielberg et Shyamalan, le film de Jordan Peele repose principalement sur un sens : la vue. Le regard joue un rôle essentiel dans Nope, les personnages doivent lutter contre ce désir de voir cette étrange chose qui les menace, il faut qu'ils résistent à cette force hypnotique suscitée par l'extraordinaire qui rend les êtres vulnérables.

Il est intéressant de constater que cette œuvre montre à quel point il est difficile de résister à la tentation car nous, spectateurs à l'abri de tous dangers, ne pouvons nous empêcher de scruter le moindre recoin de l'écran pour déceler des indices sur la nature de la menace. Toute la puissance du spectaculaire nous saisit dans le dernier acte pendant lequel notre regard est irrémédiablement attiré par ce qui apparaît à l'écran et nous ne pouvons tout simplement pas résister.

Le spectaculaire, lorsqu'il est bien fait, ce qui est le cas ici avec des effets visuels franchement réussis et plaisants car ils ne sont pas dans la surenchère, aura toujours raison de nous. Le carton à la fin du générique joue d'ailleurs encore sur cette attirance et achève d'illustrer que nous sommes malgré nous attiré par tout ce qui relève du spectacle.

Dans un monde où l'homme se veut maître et possesseur de la nature, cette œuvre rappelle que l'être humain ne peut tout contrôler et que s'il ne respecte pas ce principe, il ne pourra en éviter des conséquences qui seront forcément tragiques. Ainsi, si l’histoire ne semble pas novatrice au départ, force est de constater que Nope s’avère être une véritable proposition de cinéma où Jordan Peele réussit à apporter une touche d’originalité à un genre qui peine à trouver de nouvelles formes.

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